En effectuant de la recherche pour une prochaine exposition du Musée de l’histoire ouvrière (MHO) portant sur la classe ouvrière d’Ottawa pendant la Première Guerre mondiale, j’ai été ému par la façon dont des gens de diverses classes, religions et races se sont unis en tant que collectivité.

Ottawa est souvent qualifiée de grande ville aux allures de village. Le sentiment d’appartenance à la collectivité que suscite Ottawa est toujours présent : il fait partie de son charme et de sa personnalité et il est au cœur même de son développement. À mon avis, la recherche que j’ai menée jusqu’à maintenant ne fait que confirmer ce fait.

J’espère que vous aimerez cet aperçu de mes recherches autant que j’ai aimé recueillir les renseignements.

Campagne de financement pour un navire-hôpital

La première chose ayant retenu mon attention lors de mon exploration de sujets de recherche a été la campagne nationale de financement pour un navire-hôpital. Organisée par des femmes, cette campagne visait à lever des fonds afin de fournir un navire-hôpital à l’Empire.

L’Ordre impérial des filles de l’Empire a mené la campagne de financement avec l’objectif d’amasser 100 000 dollars. Dans History of the Hospital Ship Campaign, on note que la campagne de financement était considérée comme « [Traduction] une occasion pour toute Canadienne de manifester sa loyauté et son dévouement à l’égard de l’empire [sic] » (Imperial Order of the Daughters of the Empire, sans date, p. 2). La campagne a duré deux ou trois semaines et a permis de recueillir 282 857,77 dollars. Une partie des fonds a servi à l’achat d’ambulances motorisées et le reste a été utilisé pour la construction d’un immeuble à la Royal Naval Hospital Haslar où résidaient les infirmières (Imperial Order of the Daughters of the Empire, sans date).

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Selon le registre de L’Ordre impérial des filles de l’Empire, un montant de 19 541,14 dollars provenait d’Ottawa. Heureusement, l’Ordre n’est pas le seul à avoir conservé des renseignements au sujet des dons. En fait, le Ottawa Journal a conservé un registre plus détaillé dans lequel est inscrit le nom de chaque donateur ainsi que le montant offert. Cette liste est essentielle lorsqu’on examine la façon dont ont collaboré diverses collectivités d’Ottawa dès le début de la guerre.

Les faits mènent à constater que des filles de différentes entreprises ont mis leur argent en commun pour offrir un don, que des gens ont recueilli des dons lors d’événements et que de nombreuses personnes ont fait des dons selon leurs moyens. Tant pour la classe ouvrière que pour l’élite, la collecte de fonds était un effort communautaire. Il s’agit là d’un parfait exemple de la façon dont une collectivité comme celle d’Ottawa peut s’unir dans les moments difficiles et surpasser les attentes.

Une des histoires les plus remarquables de la campagne de financement est celle de deux jeunes garçons, Roland et Walter Garlick. Ils avaient joint à leur don de 3,50 dollars la lettre suivante : « [Traduction] Monsieur, Nous voulions aider à amasser de l’argent pour le fonds de l’hôpital-navire. Mon frère est presque aveugle, mais il a vendu son perlage qu’il a fait à l’école Brantford Blind, et j’ai vendu ma menuiserie fabriquée dans mon cours d’éducation manuelle » (Ottawa Evening Journal, 19 août 1914).

La collectivité s’est unie de la sorte à diverses occasions. Néanmoins, de nombreuses inquiétudes se faisaient sentir, particulièrement parmi la classe ouvrière, concernant la concurrence sur le marché du travail, la dilution et les coûts croissants des biens.

Mai 1918

Une deuxième question a attiré mon attention, soit celle du raid du 1er mai 1918 où la police fédérale a arrêté dix-huit hommes âgés de 21 à 56 ans lors d’une réunion des Travailleurs industriels du monde et du Nove Zhyttia au 268, rue Rochester.

Les hommes étaient rassemblés pour écouter un discours de Stefan Waskan, organisateur des Travailleurs industriels du monde établi à Toronto (Hunchuck, Moore, mai 2009). Pendant le raid, la police fédérale a confisqué de la littérature autrichienne en vue de la faire traduire et a trouvé des macarons sur lesquels était inscrit : « Social service independent workers world unite » (Ottawa Evening Journal, 2 mai 1918, p. 1).

Internment campParmi les dix-huit hommes, dix-sept ont été envoyés à Kapuskasing et libérés le 2 octobre 1919. Waskan a été le seul à ne pas se faire interner. Quoique né en Autriche, il était un citoyen naturalisé britannique, et la loi stipulant que la citoyenneté accordée après 1902 pouvait être révoquée s’appliquait seulement aux Canadiens (Hunchuck, Moore, 2009). Waskan a été détenu pour oisiveté criminelle jusqu’à ce que soit terminée la traduction du livre et de la brochure (Ottawa Evening Journal, 1918, p. 3).

Parmi les hommes envoyés à Kapuskasing, quatre sont revenus à Ottawa et ont fondé la section d’Ottawa de la Ukrainian Labour Temple Association en 1920. Des renseignements sur la vie des treize autres hommes après leur internement n’ont pas encore été trouvés (Hunchuck, 2010).

Dernières réflexions

Les enjeux entourant la classe ouvrière d’Ottawa pendant la Première Guerre mondiale contribuent à une meilleure compréhension des difficultés à surmonter et illustrent simultanément l’esprit de communauté qui régnait.

Les recherches qui ont été menées, et qui continuent d’être menées, offrent un aperçu du passé culturel d’Ottawa. Vous pouvez compter sur nous pour vous faire découvrir davantage d’information sur la classe ouvrière d’Ottawa pendant la Première Guerre mondiale.

Par Andrea Gonzalez | Traduit par Valérie Lalonde

Références

Ottawa Evening Journal. Le 19 août 1914.

Ottawa Evening Journal. Le 2 mai 1918.

Ottawa Evening Journal. Le 3 mai 1918.

Édifice des femmes canadiennes, Royal Naval Hospital Haslar. [croquis]. Dans Imperial Order of the Daughters of the Empire. Sans date. The History of the Hospital Ship Fund; Which was the Imperial Gift of the Women of Canada to the British Army and Navy 1914. Déposé aux Archives nationales MG28-I17 V33.

Hôpital Haslar, aile des femmes canadiennes. [photo]. Dans Imperial Order of the Daughters of the Empire. Sans date. The History of the Hospital Ship Fund; Which was the Imperial Gift of the Women of Canada to the British Army and Navy 1914. Déposé aux Archives nationales MG28-I17 V33.

Hunchuck, S.H., Moore, P. (12 mai 2009) 1918: Raid and Internment. Ottawa-Outaouais IWW. Consulté le 9 juin 2014, sur Internet : http://ottawaiww.org/?Page_ID=176.

Hunchuck, S.H., (2010). ‘Of course it was a Communist Hall’: A spatial, social, and political history of the Ukrainian Labour Temples in Ottawa, 1912-1965. Dans J.Mochoruk, R.L. Hinther (éd.), Re-imagining Ukrainian Canadians: History, Politics, and Identity. (403-435). Toronto : University of Toronto Press.

Imperial Order of the Daughters of the Empire. Sans date. The History of the Hospital Ship Fund; Which was the Imperial Gift of the Women of Canada to the British Army and Navy 1914. Déposé aux Archives nationales MG28-I17 V33.

Imperial Order of the Daughters of the Empire. Sans date. The IODE in Wartime; A record of women’s work for King and Empire. The Bryant Press : Toronto. Déposé aux Archives nationales MG28-I17 V33.

« Inside the campground at Kapuskasing ». [photo]. In fear of the barbed wire fence: Canada’s first national internment operations and the Ukrainian Canadians, 1914-1920. Éd. Luciuk, L. Kingston : Kashtan Press, 2001.